LE REPAS D’AUTOMNE…par Triny Anyé-Del Tedesco.
Le repas d’automne, la Retirada.
Pour ce repas d’automne, le samedi 28 novembre, à la Pergola (Lardenne), nous avons invité Progreso Marin pour un exposé sur la Retirada.
Que ce soit pour l’une ou l’autre raison, nous étions 55 , «entre nous » dans ce restaurant que Thomas Fantini ouvrait ce samedi midi, uniquement pour l’Amicale des Anciens de Berthelot .
De ses retrouvailles, nous en sommes les acteurs , et elles nous procurent toujours la surprise de belles découvertes.
Après l’apéritif, pour réchauffement et la reconnaissance (important pour choisir son voisin de table), notre historien Berthelotin s’est adressé à un auditoire attenti f (le sujet le méritait).
La « RETIRADA », ce terme exprime toute l’amertume, la détresse des Républicains Espagnols après « la bataille de l’Ebro » (de juillet à décembre 1938 ) qui fuient le franquisme. En janvier et février 1939, 500 000 s’exilèrent en France, 100 000 passèrent parle col d’Arès (66 Prats de Mollo). En abordant ce sujet qui est l’essence de sa vie et lui a donné tout son sens, Progreso Marin*(1) a défini clairement son intention : ne pas ajouter au commémorationnisme , mais
relater cette partie de l’histoire et le désespoir des vaincus qui ont été renvoyés en Espagne, « dans la gueule de leurs bourreaux »*(2), pour alerter notre vigilance au regard des dérives actuelles de notre « ministère de l’expulsion » (sic).
Pour ceux que l’espoir portait encore en pénétrant dans le pays de la République et des Droits de l’Homme , les camps d’internement que certains appelèrent « les camps du mépris »*(3) ajoutèrent à l’humiliation et au dénuement .
Pour beaucoup, cet exil devait en faire pour toujours des combattants pour la Liberté, par leur engagement dans la Résistance, et Progreso a rappelé que la 2ème DB du Général Leclerc était aussi composée de soldats Espagnols à la libération de Paris.Pour restituer l’émotion et le « non sens »de la Retirada, Progreso Marin a choisi de commenter une photo célèbre qui a servi de modèle pour le monument de l’Exil à La Vajol (Catalogne). On peut y voir Amadeo Gracia Bamala , alors âgé de 4 ans, amputé et appareillé d’une béquille qui franchit la frontière au col d’Arès avec son père , sa sœur, amputée elle aussi d’une jambe et son frère ainé. 65 ans après, son témoignage (2003) tisse la trame douloureuse de la mémoire.
Du non sens qui fait perler les larmes , au mythe d’une République rêvée, le terreau d’une
résistance et d’une solidarité fraternelle s’est constitué . Progreso Marin en est le militant infatigable.
*(1) Progreso Marin est écrivain : (2002) Dolorès, une vie pour la liberté ; (2005) •
Exil : témoignages sur la guerre d’Espagne les camps et la résistance au franquisme ;
(2008) Exilés Espagnols, la mémoire à vif (ed Loubatières)
*(2) témoignage de Amadeo Gracia Bamala
*(3) « les camps du mépris » (1991) de René Grando, Jacques Quéralt , Xavier Febrès
Faut-il préciser que Progreso Marin est fils de Républicains Espagnols et qu’il a fait une carrière de professeur de Français.
Beaucoup de fils de ces « oubliés de l’Histoire » se sont tournés vers l’enseignement ou la médecine. A ce sujet, l’hôpital Varsovie (actuellement joseph Ducuing) fut créé par des « Guérilleros », médecins . Alain Radigalès , ancien de Berthelot, en est le directeur.
A la suite de ce douloureux épisode, bon nombre de ces expatriés devront leur survie à une solidarité de proximité. Et c’est grâce au « désir têtu » des maîtres d’école d’alors, que leurs enfants ont pu réussir leur assimilation intellectuelle.
Je vous donne rendez-vous pour un prochain bulletin, avec vos réactions et contributions.
Fidèlement vôtre.
Triny Anyé-Del Tedesco
Vos réactions sont les bienvenues.